Profession policier



PROFESSION :  POLICIER



Dès que j’ai eu dix-huit ans, j’ai fait parvenir une demande d’emploi au Service de Police de la Ville de Montréal. Le processus d’embauche dura plusieurs mois et je me souviens que mes examens écrits avaient lieu le 7 octobre 1969, soit le jour même du débrayage de tous les policiers montréalais. Ce qui avait été suivi de manifestations par les chauffeurs de taxi devant les locaux de la compagnie d’autobus Murray-Hill, au centre ville, et le même soir, des émeutiers avaient fait du grabuge rue Sainte-Catherine Ouest, saccageant et pillant plusieurs commerces.


Le 1er juin 1970, je reçus une lettre m’informant que j’étais engagé et que je devais me présenter au 3030 de la rue Viau pour le début de mon entraînement. Après environ deux mois et demi de cours et d’entraînement physique, nous étions assignés dans les différentes sections du service. Notre contingent, qui comptait une centaine d’agents, tous des hommes puisqu’on n’engageait aucune femme à cette époque. Nous passions deux semaines dans les différentes sections, que ce soit les Enquête d’accident, la Police jeunesse, les Enquête criminelles ou autres. Cela nous permettait d’avoir une vue d’ensemble du service de police et, éventuellement, de pouvoir choisir une section plutôt qu’une autre.


Cette tournée des divers départements du service de police devait durer quatre mois, je crois. Mais, un beau jour d’octobre 1970, vers quatre heures de l’après-midi, alors que j’étais en stage à la section Enquête accident, le Lieutenant nous convoqua à son bureau pour nous annoncer que nous devions nous rapporter dans les postes. La crise d’octobre venait de commencer et, à minuit, je me présentai au poste numéro 10, sur le boulevard de Maisonneuve, au centre ville de Montréal.


Pendant plusieurs mois, j’ai dû faire le guet aux endroits stratégiques désignés par mes supérieurs. J’ai donc fait de la surveillance devant la maison de Richard Cross, devant la résidence d’un juge dont j’ai oublié le nom, Trottier je crois, et qui avait signé un mandat d’arrestation contre Paul Rose. J’ai également fait de la surveillance à la porte de l’Hôtel Reine- Elizabeth où furent logées pendant la crise les familles du Premier Ministre Robert Bourassa et de M. Pierre Laporte après son enlèvement.


C’est donc dans cette ambiance que débute ma carrière au service de Police de Montréal. Lorsque la crise a finalement pris fin, nous sommes retournés à l’école de police pour terminer notre formation et préparer la graduation.


En avril 1971, j’étais muté en compagnie de quarante de mes confrères au fameux poste numéro 4 dont on nous avait tant parlé pendant notre formation. Il s’agissait à ce moment-là du plus gros poste de police à Montréal. J’avais vingt ans et j’étais assurément l’un des plus jeunes policiers en ville. Je dois dire honnêtement que j’étais un peu intimidé par tout ce que je voyais. Mais cette expérience fut plus que profitable car j’ai appris beaucoup et cela m’a permis de former mon caractère.


À la fin de l’année 1977, je quittai le poste numéro 4 à regret afin de me rapprocher de mon domicile. Il faut dire qu’en 1972, j’avais connu celle que je devais épouser un an plus tard, soit le 1er septembre 1973. Elle habitait Terrebonne lorsque je l’ai connue, mais nous sommes venus nous installer rue Chateaubriand, près de Legendre, à Montréal. Nous avons demeuré à cet endroit jusqu’en mars 1976 alors que nous avons emménagé dans notre maison de Terrebonne.


C’est donc en 1977 que je fus muté au poste 44 où j’ai travaillé jusqu’en octobre 1980. Je fus alors muté au poste 43. En janvier 1983, j’obtenais une promotion et j’étais muté au poste 32 à Outremont dans la fonction de superviseur. Je suis resté à Outremont jusqu’en 1996, même après avoir obtenu le grade de sergent-détective en 1988.


Le 29 avril 1996, il y a eu le meurtre de l’agent André Lalonde qui était en devoir à Senneville. Il avait voulu intercepter un automobiliste suspect mais ce dernier lui avait tiré dessus. Quelques jours plus tard je me joignais à l’équipe d’enquêteurs assignés à ce dossier. J’avais offert mes services au lieutenant Lachapelle qui m’avait accepté dans son équipe. J’ai collaboré à cette enquête pendant vingt mois, c’est-à-dire jusqu’en janvier 1998. Ce fut une expérience formidable et très enrichissante pour moi. Cela m’a permis de côtoyer des enquêteurs chevronnés et d’apprendre à leur contact.


Pendant cette période, nous recevions souvent la visite du lieutenant détective Roberts qui travaillait dans le bureau voisin, les Enquêtes d’agressions sexuelles. À l’été 1997, il m’a proposé de venir travailler pour lui et, en décembre de la même année, j’étais admis à la section des enquêtes d’agressions Sexuelles. Même si ce n’est qu’en janvier 1998 que j’ai pu me joindre à cette équipe puisque je devais terminer certaines tâches déjà commencées dans le dossier du meurtre du policier.


Le travail aux Agressions Sexuelles était difficile et exigeant, mais combien valorisant. Il nous permettait de vraiment aider les gens. Certaines personnes gardaient des secrets en elles depuis plus de trente ans parfois. Lorsqu’elles nous racontaient leurs histoires respectives, c’était pour elles une libération.


J’ai eu la chance d’y côtoyer des enquêteurs chevronnés et aussi passionnés que moi. Ils avaient tous un cœur gros comme la Terre. Nous avions tous le désir d’aider et d’être à l’écoute des victimes, et de travailler dans le non-jugement. Ces cinq dernières années au service de police m’ont vraiment permis d’ouvrir mon cœur, ce qui m’a aidé à me préparer à ce que je fais actuellement.


Le 4 janvier 2003, je prenais ma retraite du service de police de Montréal. Jusqu’au 23 novembre, j’ai profité d’un congé bien mérité. J’en ai profité, entre autres, pour jouer au tennis trois fois par semaine. J’ai également beaucoup lu. Mon sujet de prédilection était évidemment la spiritualité.


Puis, en novembre 2003, j’acceptai un poste d’enquêteur pour une compagnie privée. Un ami et ex-policier m’avait donné la chance de retravailler dans mon domaine, les enquêtes. Je suis resté à l’emploi de cette compagnie pendant trois ans. J’ai démissionné lorsqu’on ne m’a plus permis d’exprimer mes idées sur la spiritualité.


Vocation: passeur d’âmes